Où va le Liban ? Vers des négociations directes ou indirectes avec Israël ? Et laquelle des deux options semble la plus probable à la lumière des développements rapides au Liban et au Moyen-Orient ? Il s’agit d’une question géopolitique extrêmement complexe, et la réponse dépendra de l’évolution de la situation d’ici la fin de l’année en cours.

Le président Joseph Aoun a proposé des négociations indirectes au sein du comité du mécanisme chargé de superviser l’application de l’accord de cessation des hostilités annoncé le 27 novembre 2024 et de mettre en œuvre la résolution 1701 de l’ONU, soulignant que le Liban ne s’oppose pas à l’intégration d’experts civils techniques — plutôt que de figures politiques ou diplomatiques — au sein de ce comité, à l’image des négociations qui avaient conduit à l’accord de délimitation maritime en 2022. Israël n’a pas encore répondu à la proposition d’Aoun, tout en continuant de violer quotidiennement le cessez-le-feu et de maintenir son occupation d’une partie du territoire du Sud libanais, affirmant que le Liban n’a pas respecté ses engagements concernant le désarmement du « Hezbollah ».

Le fond de la position israélienne est sa volonté d’engager des négociations directes avec le Liban afin d’aboutir à un « accord de sécurité » qui ouvrirait la voie à un « accord de paix » ou à une « normalisation » des relations — une approche soutenue par les États-Unis mais rejetée par les autorités libanaises et un ensemble de forces politiques menées par le mouvement Amal et le « Hezbollah », qui s’opposent à toute négociation politique avec Israël et soutiennent fermement la préférence de l’État pour des pourparlers indirects. Cela indique qu’aucune négociation politique — directe ou indirecte — ne peut avoir lieu sans un large consensus national libanais.

En attendant une réponse claire d’Israël, les négociations indirectes sous médiation américaine et onusienne demeurent l’option dominante. Le président a affirmé que le Liban définit ses conditions et ses objectifs pour les négociations si Israël accepte sa proposition. Pour sa part, le « Hezbollah » rejette toute négociation politique avec Israël et appelle les autorités et toutes les forces politiques à unifier leur position nationale pour faire face aux violations israéliennes et contraindre Israël à respecter la cessation des hostilités et à se retirer des zones occupées, soulignant que la question de ses armes doit être traitée en interne dans le cadre d’une stratégie de sécurité nationale définie dans le discours d’investiture et la déclaration ministérielle.

Fait notable, tous les émissaires — en particulier américains et français — tiennent le même discours aux responsables libanais : Israël affirme que le Liban « n’a pas déployé » son armée au sud du Litani, alors qu’il est largement reconnu que l’armée a déjà déployé environ 9 000 soldats, un chiffre qui devrait atteindre 10 000 d’ici la fin de l’année, et qu’Israël empêche lui-même l’armée libanaise de se déployer le long de la frontière, tandis que des responsables israéliens déclarent ouvertement qu’aucun retrait du Liban n’aura lieu.

Tous les indicateurs militaires, politiques et diplomatiques montrent qu’Israël cherche à maintenir la pression sur le Liban afin de l’obliger à désarmer le « Hezbollah » et à l’entraîner dans des négociations directes pour signer un accord « mettant fin à l’état de guerre », comme l’affirment certains diplomates, ce qui conduirait finalement le Liban à un traité de paix, à une normalisation ou à son intégration aux « Accords d’Abraham ». Certains observateurs proches de la position américaine décrivent la phase actuelle comme une « période de temps perdu », notant que l’attention américaine et israélienne est désormais concentrée sur la Syrie d’abord, puis sur le Liban, notamment après la visite du président syrien Ahmad el-Charraa à Washington et sa rencontre avec le président Trump.

Les travaux devraient commencer pour mettre en œuvre les résultats de cette visite, dont le premier a été l’accord de sécurité américano-syrien incluant l’établissement d’une base militaire américaine à Damas (la base aérienne de Mazzeh). Israël cherchera à accélérer ses démarches vers Damas pour surmonter les obstacles entravant les négociations en cours visant à signer un accord de sécurité, qui servirait également de prélude à attirer la Syrie vers la normalisation au sein des « Accords d’Abraham ». Israël se consacrerait ensuite pleinement au Liban, auquel il semble avoir été donné jusqu’à la fin de l’année pour régler la question des armes du « Hezbollah ». Si cela ne se produit pas, Israël pourrait recourir à une nouvelle guerre, qu’il menace de lancer ces derniers temps.

On ignore encore dans quelle mesure la visite prévue du pape Léon XIV au Liban à la fin du mois pourrait influencer le cours des événements, compte tenu de l’intransigeance israélienne — soutenue par les États-Unis — à vouloir mettre fin à l’existence du « Hezbollah ». Entre-temps, les négociations indirectes libano-israéliennes au sein du comité du mécanisme devraient se poursuivre, probablement dans une impasse circulaire, alors que les autorités libanaises distinguent de plus en plus leur position de celle du « Hezbollah », le président réaffirmant à plusieurs reprises que le parti « n’intervient pas » dans la zone située au sud du Litani.

Quoi qu’il en soit, le Liban continue de privilégier l’option des négociations indirectes, dans la mesure où ce modèle a permis de défendre ses intérêts lors de l’accord de délimitation maritime de 2022 — parrainé par les États-Unis et les Nations unies — qui a permis au Liban de commencer l’exploration pétrolière et gazière dans le champ de Qana et ailleurs. Et rien n’empêche que des négociations au sein du comité du mécanisme aboutissent à un accord visant à confirmer — plutôt qu’à délimiter — la frontière terrestre, sur la base de l’accord d’armistice signé en mars 1949, toujours en vigueur aux Nations unies malgré le retrait unilatéral d’Israël, invoquant la légalisation par le Liban des activités de la guérilla palestinienne en vertu de l’accord du Caire de 1969.