À une époque où les slogans se sont effondrés sous le poids des faits, le Liban semble enfin placé devant un choix qui ne tolère plus l’ambiguïté : soit il écoute la voix de la raison exprimée par le président Joseph Aoun, soit il demeure otage de slogans qui consument ce qu’il reste d’un pays qui ne peut plus supporter davantage de guerres par procuration. Dans un Moyen-Orient qui ne se lasse jamais de surprises, le « Hezbollah » semble se réveiller chaque matin avec un nouveau choc, découvrant que le monde n’est plus convaincu par ses slogans et que sa marraine à Téhéran a désormais besoin d’être consolée plutôt que d’offrir protection. Entre la visite du président syrien Ahmad al-Charaa à la Maison-Blanche, les discussions à Washington sur la création possible d’une base militaire à al-Mezzeh près de Damas, et une autre dans la bande de Gaza, il semble que « l’Axe de la résistance » n’ait plus de la résistance que le nom, et de l’axe que la rotation sur lui-même.
Une trêve au bord de la guerre
Tout cela intervient alors que s’approche le premier anniversaire de l’accord de cessation des hostilités signé entre le Liban et Israël le 27 novembre dernier, dans un climat de mises en garde laissant entendre que l’occasion risque de se transformer en nouvelles cérémonies funèbres répétées si les acteurs concernés n’écoutent pas la voix de la raison, d’autant que la presse israélienne ne hésite pas à qualifier l’accord « d’encre sur du papier » et affirme qu’Israël agite de nouveau la menace de la guerre, tandis que le « Hezbollah » tente de reprendre son souffle au milieu des décombres du Sud. Dans ce paysage turbulent, les propos du président Joseph Aoun ont émergé comme une bouffée de réalisme en temps de slogans. Il a affirmé que le Liban n’a toujours reçu aucune réponse israélienne à l’option de négociation qu’il avait proposée pour libérer la terre, ni aucune position américaine claire à ce sujet, soulignant qu’il attend l’arrivée du nouvel ambassadeur américain à Beyrouth « qui pourrait apporter une réponse israélienne », puis il a ajouté une phrase résumant toute la position nationale : « La logique de la force ne fonctionne plus, nous devons aller vers la force de la logique. » Il a poursuivi, demandant avec une clarté remarquable : « Si nous ne sommes pas capables d’aller à la guerre, et que la guerre nous a menés aux calamités, et qu’une vague de compromis traverse la région, que devons-nous faire ? »
Le dossier libanais aux mains américaine et syrienne
S’agissant de la Syrie, le président Aoun a rassuré que « parler d’un mandat du Liban confié à la Syrie n’est ni justifié ni nécessaire », notant que la stabilité de la Syrie est essentielle à la stabilité du Liban, et que la rencontre entre le président américain Donald Trump et le président syrien Ahmad al-Charaa est une évolution positive, puisque la levée des sanctions américaines contre la Syrie « profiterait également au Liban ». Cette position officielle libanaise est venue dissiper les rumeurs selon lesquelles le dossier libanais pourrait être remis à Damas dans le cadre d’une entente américano-syrienne émergente redessinant les lignes d’influence dans la région.
Al-Mezzeh et Gaza : deux bases américaines ou une double menace pour l’axe iranien ?
Il ne fait aucun doute que la multiplication des discussions autour de la création possible d’une base militaire américaine à al-Mezzeh, à quelques kilomètres du palais présidentiel syrien, n’est plus une simple rumeur. Le sens est clair : ceux qui brandissaient autrefois des slogans anti-américains expérimentent aujourd’hui la vie post-sanctions sous son parapluie aérien. À l’inverse, l’idée d’une autre base dans la bande de Gaza commence à se poser pour l’après-guerre, servant de poste d’observation permanent surveillant l’Iran, le « Hamas » et le « Hezbollah » simultanément. Ce faisant, Washington place tous les acteurs de « l’Axe de la résistance » sous son radar direct, tandis que « le parti » n’a plus le luxe de prétendre « libérer Jérusalem depuis la banlieue sud ». À Tel-Aviv, les responsables israéliens ne cachent pas leur volonté de briser « l’épine de l’Iran » avant la fin du deuxième mandat de Trump. Les Israéliens comprennent que le moment est favorable et que le soutien américain est sans précédent, tandis que le régime iranien traverse ses pires crises économiques et politiques.
Hurley à Beyrouth : l’argent illicite resserre l’étau autour du « parti »
La visite à Beyrouth du secrétaire adjoint au Trésor américain John Hurley a constitué un avertissement final, sans complaisance. Il a insisté sur le fait que Washington ne permettra pas l'arrivée d’un seul dollar destiné à la reconstruction du Liban tant que le « Hezbollah » n’aura pas été entièrement désarmé et que son financement iranien n’aura pas été définitivement tarie. Il ne s’agit pas de simples sanctions financières, mais d’une stratégie méthodique d’assèchement des artères de l’organisation, allant de la surveillance des bureaux de change au gel des comptes impliqués, dans une tentative de priver « le parti » des outils qui en ont fait un État dans l’État. Ainsi, le dossier libanais semble aujourd’hui circuler entre les capitales comme un dossier d’investissement plutôt qu’une affaire souveraine. L’État, qui était censé tenir les rênes, est devenu otage des équilibres régionaux, et un « parti » qui prétendait protéger la souveraineté a fini par la faire gérer par procuration depuis l’extérieur. Pourtant, les propos du président Joseph Aoun pourraient constituer le début d’une sortie de ce tunnel, rappelant que « la force de la logique » peut réparer ce que « la doctrine de la force » a détruit, et que le dialogue et le réalisme sont les deux seules voies pour sauver le Liban d’être de nouveau placé sur les cartes des autres plutôt que sur la carte de ses propres enfants… et la bonne intention demeure toujours au cœur de la démarche.
Prière de partager vos commentaires sur:
comment@alsafanews.com
