Le président du Parlement, Nabih Berri, se retrouve aujourd’hui acculé dans une impasse politique qu’il a lui-même contribué à créer. C’est lui qui a négocié l’accord de cessez-le-feu demandé par le « Hezbollah » pour arrêter la machine de guerre israélienne. Il l’a approuvé dans toutes ses clauses et interprétations, non pas en sa qualité de chef de l’autorité législative libanaise, mais comme partenaire dans l’équation politique chiite — agissant à la demande du « Hezbollah » alors que le parti n’était pas en position d’imposer des conditions.

L’accord adopté par le gouvernement libanais était explicite : Israël garderait toute liberté de mouvement jusqu’à ce que Beyrouth démantèle l’infrastructure militaire du « Hezbollah » et neutralise toutes les armes — légères, moyennes ou lourdes — en dehors du cadre des institutions militaires et sécuritaires légitimes de l’État.

Le « Hezbollah » est désormais face à l’heure de vérité. Le gouvernement a décidé de façon formelle de limiter toutes les armes à l’autorité de l’État et a chargé l’armée d’élaborer un plan qui sera discuté en Conseil des ministres le 5 de ce mois, avec trois jours de retard sur le calendrier initial. La décision de neutraliser l’arsenal du « Hezbollah » est définitive et irréversible, même si les dirigeants du parti affirment qu’ils ne déposeront jamais leurs armes, mettant quiconque au défi de les prendre.

Aujourd’hui, le « Hezbollah » n’a que trois options : continuer à refuser le désarmement, tenter de gagner du temps, ou se conformer à la décision du Conseil des ministres et se transformer en un parti politique purement local, coupé de toute attache idéologique et militaire extérieure.

Mais la défiance prolongée n’est pas tenable. La « décision de guerre » ne lui appartient plus. Ses stocks restants sont insuffisants, notamment après les frappes israéliennes répétées contre ses dépôts, le basculement politique et militaire en Syrie après le changement de régime, et la coupure des routes d’approvisionnement depuis l’Iran. De plus, la guerre est devenue trop coûteuse. La crise financière du parti l’a déjà contraint à cesser de payer nombre de ses soutiens.

Les manœuvres dilatoires ne pourront pas durer longtemps non plus. Des échéances régionales majeures se profilent à la fin du mois, avec la conclusion de plusieurs dossiers, dont celui de Gaza.

En réalité, il ne reste au « Hezbollah » qu’une seule voie : le désarmement. Ironie du sort, il pourrait bientôt constater que déposer les armes est sa meilleure option, avant que celles-ci ne deviennent un fardeau.

L’envoyé américain, l’ambassadeur Tom Barrack, a été clair : la neutralisation de l’arsenal du « Hezbollah » relève en dernier ressort de la responsabilité libanaise — même si elle constitue une condition préalable imposée par Washington et Tel-Aviv pour maintenir le cessez-le-feu. Barrack est allé plus loin, en évoquant la question des négociations directes avec Israël, encore taboue au Liban mais qui, selon lui, s’imposera tôt ou tard si le pays veut retrouver une vie normale.

Pour toutes ces raisons, Berri a fini par concéder amèrement : « Que l’accord du 17 mai paraît doux aujourd’hui. » Cet accord controversé, négocié en 1983 par l’ambassadeur Antoine Fattal et torpillé par le soulèvement du 6 février 1984, promettait le retrait israélien dans un délai de deux ans et consacrait la Ligne 29 comme frontière maritime du Liban.