Avec l’alignement dans le temps des deux crises en Ukraine et au Moyen-Orient, l’Europe se trouve partagée en raison des choix individuels de ses composantes sociales et socio-économiques, et des choix individuels des pays membres, pour des raisons essentiellement éthiques. L'Europe est confrontée à deux chocs géopolitiques majeurs : La guerre Russe en Ukraine, depuis 2022, et l'escalade du conflit israélo-palestinien et ses répercussions plus larges au Moyen-Orient, depuis fin 2023.

Chacune de ces crises exige des ressources diplomatiques, militaires, humanitaires et financières unifiées, mais la marge de manœuvre est limitée par les priorités nationales divergentes.

L'Europe de l'Est, essentiellement la Pologne et les États de la Baltique, sont focalisés sur la dissuasion de la Russie, alors que l'Europe du Sud, essentiellement l’Italie, l’Espagne et la Grèce, se sentent plus concernées par la stabilité en Méditerranée, et donc plus largement au Moyen-Orient. Ces pays sont plus sérieusement touchés par les migrations de populations autour du bassin méditerranéen.

Plus au Nord, la France et l’Allemagne sont sur une corde raide tentant de trouver un équilibre entre les deux. Mais là encore, les divergences sont profondes en raison des désaccords internes communs aux deux pays.

La guerre en Ukraine

Il faut cependant noter qu’il existe une position commune sur la guerre en Ukraine s’agissant des sanctions, de l’aide militaire et la coordination au sein de l’OTAN. On note l’attitude hésitante de l’Allemagne, de la Hongrie et de la Slovaquie au sujet de l’aide militaire, bien que l’escalade avec la Russie persiste en fond de toile avec la perspective financière très sombre du devoir de reconstruction de l’Ukraine après-guerre et la gestion des flux migratoires des Ukrainiens a travers l’Europe. La guerre en Ukraine a déplacé plus de 6 millions de personnes. Ces problèmes alimentent les gains électoraux d’extrême droite (par exemple, l’AfD en Allemagne, Le Pen en France, Meloni en Italie, mais aussi des conflits internes à l’UE concernant les quotas d’asile et le partage des charges, ainsi que les politiques frontalières plus strictes et le discours anti-immigration, questions qui affaiblissent encore davantage l’unité.

Le Moyen-Orient

Concernant le Moyen-Orient, L’Europe peine à articuler une position commune cohérente, et les divisions sont plus marquées. La France préconise un cessez-le-feu à Gaza et est ouverte à la reconnaissance de l’État palestinien., alors que l’Allemagne se montre plus prudente en raison de sa responsabilité historique envers Israël. Les pays de l’Est européen, s’alignent sue le concept de sécurité d’Israël, et ceux du Sud sont essentiellement concernes par les flux migratoires, bien que l’Espagne se soit prononcée en faveur d’un État Palestinien.

L'unité de l'Europe est donc mise à rude épreuve alors qu'elle tente de gérer simultanément ces deux crises déstabilisatrices.

Les répercussions

En attendant d’éventuelles solutions, la guerre en Ukraine a interrompu l’approvisionnement en gaz russe, forçant l’Europe à se tourner vers les marchés énergétiques du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. Mais la aussi avec les frappes iraniennes en Israël, ont déstabilisé les approvisionnements en gaz. La hausse des prix mondiaux des matières premières et de l’énergie, due aux deux conflits, a eu des répercussions différentes sur les économies européennes, creusant les divisions économiques Nord-Sud au sein de l’UE.

Au niveau des politiques étrangères, le fossé se creuse encore davantage en raison du désintérêt des Etats-Unis qui accordent de plus en plus la priorité à la région indopacifique et se montrent incohérents dans leur engagement au Moyen-Orient. De ce fait, l’Europe est divisée sur la question de savoir dans quelle mesure elle doit suivre les positions de Washington, notamment sur Israël et la Palestine. Au niveau de l’OTAN, le consensus s’effrite alors que certains membres souhaitent se concentrer sur la stabilisation du Moyen-Orient tandis que d’autres insistent sur le fait que l’Ukraine reste la principale menace.

L’Europe hésitante alloue toujours une aide militaire élevée à l'Ukraine mais en déclin, tandis que l’Europe perd en crédibilité au Moyen-Orient ou l’aide humanitaire reste imprécise.

En définitive, on peut conclure que l’Europe n’a d’autre choix que de resserrer ses rangs face à ces deux conflits géostratégiques qui menacent sa stabilité.