Trois développements récents positifs ont ravivé un certain optimisme quant à l’avenir du Liban — mais un signal d’alarme majeur continue de peser sur la situation, rendant, selon les mots d’une figure politique, l’ensemble du contexte « sens dessus dessous ».

Lueur d’espoir : les trois signaux positifs

Le premier signal positif est venu de Washington : le président américain Donald Trump a annoncé la levée des sanctions contre la Syrie. Si la stabilité revient dans le pays, cette décision pourrait permettre le retour des réfugiés syriens installés au Liban, afin qu’ils participent à la reconstruction de leur pays après quatorze années de guerre dévastatrice. L’annulation des sanctions imposées par la loi César pourrait également permettre au Liban de commencer à remédier à une partie de sa crise énergétique chronique — en important du carburant et du gaz depuis l’Égypte et la Jordanie via la Syrie, ainsi qu’en recevant du fuel irakien, à condition toutefois que les puissantes mafias des générateurs électriques ne s’y opposent pas.

Le deuxième signe d’espoir est apparu au sein de la Banque centrale. Le nouveau gouverneur, Karim Souaid, a remis tous les documents demandés à la société Alvarez & Marsal, chargée par le ministère des Finances d’un audit juricomptable. La Banque centrale s’est également dite prête à coopérer pleinement si l’État libanais décidait d’élargir le mandat confié à la société, dans un esprit de transparence. Cette démarche s’inscrit dans la continuité de l’initiative d’audit promue par l’ancien président Michel Aoun — un processus longtemps bloqué par certains acteurs locaux, notamment l’ex-gouverneur Riad Salamé. Si les réactions officielles sont restées mesurées, le Courant patriotique libre a salué cette étape, espérant qu’elle permettra d’identifier les responsables du vol des dépôts, de les traduire en justice, et de restituer les fonds aux déposants. Elle pourrait aussi révéler l’implication de personnes physiques ou morales liées directement ou indirectement à la Banque centrale, soupçonnées de détournement de fonds ou d’enrichissement illicite.

Le troisième signe positif est celui de la résilience démocratique : le Liban mène à bien la dernière phase de ses élections municipales et locales, qui ont lieu ce samedi dans les provinces du Sud et de Nabatiyeh. Malgré les menaces et attaques israéliennes qui continuent de semer la mort et la destruction, les habitants du Sud ont choisi de répondre non pas par la peur, mais par les urnes. Leurs votes incarnent la résilience, l’espérance, et un attachement indéfectible à leur terre et à leur avenir — un message de défi non seulement à Israël, mais aussi aux pressions régionales, internationales, et locales.

Un signal d’alarme majeur… et d’autres encore

Mais du cœur même de cette dynamique démocratique surgit un avertissement : le plus grand signal négatif reste l’inaction du pouvoir libanais. Plus de cent jours après leur entrée en fonction, le président et le gouvernement n’ont toujours pas pris les décisions cruciales attendues — notamment celles exigées par les parrains internationaux et régionaux, en particulier la question du désarmement du Hezbollah.

Les appels à résoudre cette question se font de plus en plus pressants, tandis que le pouvoir persiste à miser sur le dialogue — un processus qui, s’il est effectivement amorcé de manière discrète, ne saurait satisfaire ceux qui tiennent les rênes. Ceux qui ont facilité l’accession au pouvoir de l’équipe actuelle semblent l’avoir fait sur la base de promesses d’action rapide ; or, ils sont confrontés à des reports répétés. Jusqu’à quand ce schéma va-t-il perdurer ? Et combien de temps encore ses parrains étrangers le toléreront-ils ?

Une inquiétude croissante monte : celle qu’un acteur local décide de prendre l’initiative et d’imposer sa propre solution — mettant ainsi en péril l’équilibre institutionnel du Liban et les coutumes politiques en place depuis des décennies. Pire encore : cette initiative pourrait bénéficier d’un feu vert tacite de certaines puissances extérieures.

Dans ce contexte, la crainte s’intensifie que la paix avec Israël ne soit plus une question de « si », mais de « quand » — et qu’elle soit imposée, non négociée. Je soulevais déjà cette hypothèse dans ma chronique de la semaine dernière, et les signes ne cessent de se confirmer.

Deux autres signaux négatifs

Au-delà de ce danger imminent, deux autres dérives préoccupantes émergent :

La première concerne le comportement agressif et excluant de certains partis politiques après leur victoire aux municipales dans certaines villes. Comment bâtir un État viable si l’esprit d’annulation de l’autre prévaut parmi une partie de la population ?

La seconde vient d’un communiqué présidentiel mettant en garde les journalistes contre toute critique visant des pays « amis ». Depuis quand la liberté d’expression au Liban se plie-t-elle aux susceptibilités étrangères ? L’ennemi d’hier n’est-il pas parfois l’allié d’aujourd’hui, et vice versa ? Le Liban n’est-il pas reconnu dans la région — et même au-delà — pour sa liberté de la presse ? L’opinion d’un individu ou d’un groupe à propos d’un pays, quel qu’il soit, n’engage en rien la position officielle de l’État libanais. Les esprits lucides comprendront bien le sens de tous ces signaux.