Marc Touati est économiste . Il s’alarme de la situation financière française de plus en plus délicate .


Le Premier ministre français, François Bayrou a dévoilé sa copie budgétaire… Quelles pistes à creuser en priorité aurait-il fallu mettre sur la table pour réaliser immédiatement les 40 milliards d’euros d’économies nécessaires ?

Se focaliser uniquement sur ces économies de 40 milliards d’euros n’a évidemment pas de sens. Il suffit que la croissance économique tombe à 0,4 %, que le taux de chômage augmente à 9 % et que les taux d’intérêt des obligations augmentent encore (des cas très probables) pour que le déficit public se creuse d’au moins 40 milliards d’euros ! C’est pourquoi, au risque de surprendre, et de manière à restaurer la confiance des entreprises et des citoyens français, il est avant tout urgent de baisser les impôts pour tous ! Baisser les impôts pour tous, notamment la CSG et les impôts sur la production : - 25 milliards d’euros dans les deux cas, soit un « manque à gagner » de 50 milliards, mais qui sera en partie compensé par le rebond de la croissance et la suppression de nombreuses niches fiscales, ce qui permettra de récupérer au moins 30 milliards d’euros.

Dans le même temps, il serait évidemment indispensable de baisser les dépenses de fonctionnement, qui représente d’ailleurs 32,4 % de l’ensemble des dépenses publiques, soit le deuxième poste de ces dernières après l’ensemble des prestations sociales à 44,7 % du total. Il est donc grand temps de les réduire d’au moins 50 milliards d’euros.

De plus, il sera également déterminant de lutter contre toutes les fraudes. Tout d’abord la fraude fiscale qui oscille entre 30 à 50 milliards d’euros par an. Evidemment, il ne s’agit pas d’intensifier les contrôles fiscaux sur les PME, qui ne ramèneront que quelques dizaines de millions d’euros et se traduiront par une augmentation des faillites d’entreprises, qui atteignent déjà des sommets historiques. Il faut surtout s’attaquer à l’économie parallèle et aux trafics en tous genres, qui continuent de se développer en toute impunité fiscale.

Il sera également indispensable de lutter contre la fraude sociale qui se situe entre 20 et 40 milliards d’euros par an. Dans le pire des cas, ces efforts contre les fraudes se traduiront par un gain de 50 milliards d’euros.

Au total, en dépit de la baisse des impôts, le déficit public pourra donc être réduit sur une année d’au moins 80 milliards d’euros. Les solutions existent donc bien, il suffit simplement d’avoir le courage de les mettre en place !

La dette française représente près de deux fois supérieure à la limite maastrichtienne ! la France fait partie des pays les plus endettés de la zone euro, devancée seulement par la Grèce (153,6%) et l’Italie (135,3%). Notre situation est intenable. Que va t’il se passer ?

C’est même plus dramatique que cela, puisque la France est le seul pays de la Zone Euro qui dérape autant sur les déficits et la dette de ses administrations publiques. Depuis 2024, la France a décroché la triste palme du pays de la Zone Euro affichant le plus fort déficit public.

La dette française, non seulement croit sans interruption, mais cet endettement exponentiel est supérieur à la croissance de la richesse créée année après année…

Un véritable scandale d’Etat ! Depuis le début 2020, la dette publique française a explosé de 958,4 milliards d’euros. Or, sur cette même période, le PIB en valeur (c’est-à-dire augmenté de l’inflation) a progressé de 500,8 milliards d’euros. Oui, vous ne rêvez pas : il manque 457,6 milliards d’euros...Depuis le printemps 2017, la situation est évidemment encore plus impressionnante : + 1 089,8 milliards d’euros pour la dette publique, contre + 641,8 milliards d’euros pour le PIB en valeur, soit un écart de 448 milliards d’euros.

Entre 1973 et 2024, les dépenses publiques sont passées de 40,9% à 57% du PIB ! En 2027, faudra-t-il couper brutalement ces dépenses publiques comme en Argentine ? Les enjeux de l’élection présidentielle seront financiers et macro-économiques !

Pardon ! Mais , la question est : notre situation financière pourra-t ’elle attendre encore deux ans ? Nous n’avons plus le choix et nous n’avons pas deux ans devant nous ! Il faut agir vite. De 1980 à 2024, les dépenses publiques ont augmenté de 680 %, alors que sur la même période le PIB en valeur (c’est-à-dire augmenté de l’inflation) a progressé de 550 %. 130 points d’écart ! Encore un autre scandale national !

Pourtant, il est encore possible d’assainir les finances publiques sans drame social et sans augmenter les impôts. Comment ? Il suffit de diminuer drastiquement les dépenses de fonctionnement.

La France pourrait bientôt consacrer davantage de ressources au remboursement de ses créanciers qu’au service des Français, payeurs invétérés d’impôts ! Les 100 milliards d’euros de service de la dette sont en vue … Folie !

D’ores et déjà, compte tenu de l’augmentation passée des taux d’intérêt des obligations d’Etat, la charge d’intérêts de la dette atteindra les 70 milliards d’euros cette année et les 100 milliards d’euros annuels « à court terme », selon les prévisions de Bercy. Autrement dit, le simple fait de rembourser les intérêts de la dette va encore aggraver cette dernière : c’est ce que l’on appelle une « bulle de la dette », qui est d’ailleurs présente en France depuis 2007, mais qui atteint désormais des proportions vraiment dramatiques.

La crise politique, en France est imminente… L’attitude des agences de notation risque de changer ?

Oui, compte tenu de la crise politique qui se dessine pour la rentrée, elles n’auront alors plus le choix. La note de la France sera donc abaissée à simple A, ce qui se traduira par une augmentation des taux d’intérêt des obligations de l’Etat français à 4 %, voire 4,5 %. En plus d’alourdir le coût (déjà exorbitant) de la dette publique, cette tension des taux d’intérêt obligataires cassera encore davantage l’investissement des entreprises, ainsi que la consommation et l’investissement logement des ménages. De quoi aggraver la récession qui est en train de s’installer dans notre « douce France ». Mais, à part ça, tout va très bien Madame La Marquise !

Symbole bien français…La France n’en finit jamais avec le débat infini sur la question de la retraite mais pas de débat sur la réforme des dépenses publiques, la stratégie économique porteuse de croissance et donc finalement pour l’avenir du pays !

Vous avez entièrement raison ! Et c’est bien là le drame ultime : la France est le seul grand pays développé qui a refusé de moderniser ses structures économiques, de manière à les rendre plus fécondes en créations de richesses et en emplois.

Nous avons besoin de que j’appelle de mes vœux depuis des années, en l’occurrence une « thérapie de choc bienveillante », qui alliera notamment baisse massive des impôts pour tous (entreprises et ménages), baisse drastique des dépenses publiques (notamment de fonctionnement), réduction du coût du travail et augmentation des salaires nets…